LE FIGHTPOD EST IL LEGAL ?

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/ Janvier 2022 /

Le Fightpod consiste pour les participants d’une soirée à brancher leur Ipod sur une console et permettre à toute la salle d’écouter la musique de leur choix. Mais cette écoute entre-t-elle dans le cadre  d’une diffusion dans un cercle familial ou au contraire les participants doivent-ils obtenir l’autorisation des auteurs pour diffuser leurs titres ?

Lorsque nous utilisons de la musique que  nous n’avons pas produite, il faut toujours se poser la question de la légalité de cet usage. Le droit ne semble pas avoir de place dans la musique, mais il est, en réalité, partout. Le fightpod, impliquant l’utilisation de musique conservée sur les iPod, il faut se demander si le fightpod est légal. Savoir si le fightpod est légal, c’est savoir si les participants de cette activité ont le droit d’utiliser, librement, la musique d’artistes pour le bien de leurs jeux et de leurs soirées.


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Dans la mesure où, le fightpod ne rentre pas dans la catégorie d’un usage dans le cercle familial,    une autorisation devrait être sollicitée. Toutefois, répondre à la question de savoir si le fightpod est légal ne se fera pas aussi facilement. Il faudra donc étudier la mise en œuvre du fightpod , lui-même. Une réponse claire pourra apparaitre, dès lors.

Dès lors qu’une œuvre est originale (notion appréciée largement par la jurisprudence), elle bénéficie de la protection offerte par le Code de la Propriété Intellectuelle. Cette protection s’applique notamment aux œuvres musicales telles celles stockées sur un Ipod ou un lecteur Mp3. Ainsi, l’auteur dispose de deux types de droits :

- le droit moral : L 111-1 alinéa 2 du Code de la propriété Intellectuelle indique que « le droit de l’auteur comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ». C’est un droit extrapatrimonial attaché à la personne de l’auteur et qui tend à conserver et à défendre l’œuvre. Les attributs du droit moral sont énoncés aux articles L 121-1, L 121-2 et L 121-4 du même code.

Le Fightpod ne porte atteinte d’aucune manière que ce soit au droit moral de l’auteur, inutile donc de s’y attarder plus longuement.

- les droits patrimoniaux comportent le droit de reproduction (droit exclusif qui appartient à l’auteur d’autoriser la duplication de son œuvre par un procédé quelconque), le droit de représentation (c’est le droit d’exécuter publiquement des œuvres par tout moyen) et enfin le droit de suite.

Le Fightpod peut à cet égard être considéré comme une atteinte au monopole de l’auteur. Cette pratique est-elle légale ?

En premier lieu, il convient de savoir si le Fightpod constitue une mise à disposition de l’œuvre au public, auquel cas il s’agirait d’une violation du droit de représentation appartenant exclusivement à l’auteur.

En second lieu, si la première question a fait l’objet d’une réponse positive, nous devrons déterminer si le Fightpod peut s’apparenter à une des exceptions au droit de représentation prévues par le Code de la Propriété Intellectuelle.

 

I. Le Fightpod : une forme de mise à disposition de l’œuvre au public

Représenter une œuvre, c’est l’exhiber au public : diffuser le film ou l’émission de radio, passer le CD ou le karaoké, transmettre l’œuvre en ligne sur un ordinateur…

Diffuser une musique fixée sur un support numérique (tel un Ipod) via un branchement à une sono en discothèque constitue donc bien un acte de représentation de l’œuvre, relevant dés lors du monopole de l’auteur.

Concernant la notion de communication au public visé par l’article L 122-2 qui définit la représentation, il convient de se tourner vers la jurisprudence.

Dans les années 40, la Cour de Cassation développe une jurisprudence sur les aubergistes : les bars, restaurants et magasins doivent conclure un contrat avec l’auteur pour diffuser la radio sous réserve d’une condamnation.

Dans le même sens, l’arrêt CNN rendu par la première chambre civile le 6 avril 1994 considère que « l’hôtel qui offre à sa clientèle la possibilité de capter dans les chambres des programmes TV réalise un acte de communication constituant une représentation des œuvres télévisuelles dans la mesure où l’ensemble des clients de l’hôtel constitue un public à qui la direction de l’établissement transmet les programmes de télévision, dans l’exercice et pour les besoins de son commerce ».

La Cour de Justice de l’Union européenne, dans un arrêt du 28 octobre 2020, affirme que « tout acte par lequel un utilisateur donne, en pleine connaissance de son comportement, accès à des œuvres protégées est susceptible de constituer un acte de communication ». (1)

Si l’on raisonne par analogie, bien que la question n’ait pas encore été soumise aux juges du fond, l’on peut conclure que la diffusion de musique stockée sur un Ipod ou un lecteur Mp3 branché sur une sono à toute la clientèle de la discothèque constitue bien une communication de l’œuvre au public. L’on peut donc prévoir avec une quasi certitude la solution des juges du fond : la pratique du Fightpod, en l’absence de contrat conclu avec l’auteur, constitue un mode de représentation de l’œuvre au public condamnable.

Reste à savoir si le Fightpod s’assimile à une des exceptions prévues par le Code de la Propriété Intellectuelle.

 

II. Le Fightpod excède le cadre strict du cercle de famille

L’article L 122-5 du Code de la propriété Intellectuelle prévoit un éventail de situation dans lesquelles l’auteur ne peut interdire les actes d’usage de son œuvre c'est-à-dire où il perd son monopole ainsi que son droit corrélatif à rémunération. Dans 4 hypothèses les droits de l’auteur sont neutralisés : l’exception de copie privée, le droit de citation, l’usage de l’œuvre dans le cercle de famille et la parodie.

La question qui se pose ici est donc de savoir si le Fightpod s’apparente à un usage de l’œuvre dans le cadre strict du cercle de famille.

L’article L 122-5 1° autorise « les représentations privées et gratuites effectuées exclusivement dans un cercle de famille ». Mais que faut-il entendre par là ? L’on comprend aisément que le cercle de famille s’oppose à la notion de public mais le terme famille est-il aussi restrictif qu’il y parait ??

Ici encore c’est à la Cour de Cassation qu’est revenu le soin de dessiner les contours de cette notion, d’une façon une fois de plus largement favorable à l’auteur, interprétation que les juges du fond ont d’ailleurs appliquée sans aucune résistance.

Le Tribunal correctionnel de Paris, le 24 janvier 1984, a considéré que « le cercle de famille est une notion qui doit s’entendre de façon restrictive et concerner les personnes parents ou amis très proches, qui sont unies de façon habituelle par des liens familiaux ou d’intimité ».

En outre, la Cour d’appel de Montpellier, dans un arrêt rendu le 10 mars 2005, avait étendu le cercle de famille à celui de « copain » et « amis ». Désormais, la jurisprudence retient, en principe, que le cercle de famille inclut toutes les personnes qui sont unies de façon habituelle par des liens familiaux ou d’intimité. (2)

Ainsi sont soumises au droit de représentation la projection d’une œuvre audiovisuelle dans un autocar, la diffusion d’émissions dans une maison d’enfants…

D’une manière générale, le lieu ne doit pas être accessible au public et à cet égard, les juges se livrent à une appréciation au cas par cas.

Des lors, la clientèle d’une boite de nuit, à l’instar d’une maison d’enfants ou des voyageurs dans un autocar, ne devrait pas être assimilable à un cercle de famille: au niveau du nombre de personnes dans le lieu en question, au niveau du caractère habituel et intime des liens les unissant…tout concorde pour conclure à la notion de public, exclusive du strict cadre du cercle de famille et obligeant par là même les acteurs du match de Fightpod à obtenir l’autorisation de l’auteur des musiques, à défaut de laquelle ils s’exposent à une condamnation pour violation du monopole de l’auteur.

Cette solution s’applique a fortiori si les musiques ont initialement été obtenues de façon illicite via des logiciels de peer to peer

Pour lire une version de cet article sur la légalité du fightpod, dans une version plus adaptée aux mobiles, cliquez

Sources :

(1)   : CJUE 28 octobre 2020 , n° c-637/19

(2)   : CA de Montpellier, 10 mars 2005

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