UN CONTRAT PRENUPTIAL POUR BIEN DIVORCER, QUI DIT MIEUX ?

La conclusion d’un contrat prénuptial n’est plus si désuète qu’auparavant, sa pratique revient au-devant de la scène juridique. Celui-ci permet de se soustraire aux règles standards du partage des biens familiaux, procédure qui est de plus en plus reconnue à l’étranger.

Le contrat prénuptial dessine, avant le mariage, les conditions d’un futur divorce. Les couples qui désirent éviter les règles standards concernant les biens familiaux, le domicile familial, le versement d’une pension au conjoint ou les droits de pension choisissent en effet d’établir un contrat qui précise les droits de chaque partenaire dans l’éventualité d’une rupture de la relation ou du décès de l’une des parties. La signature du contrat prénuptial contribue alors à mettre fin à des doutes sur la façon dont un Tribunal pourrait répartir les biens et décider de la pension alimentaire en cas de divorce.

Ce type de contrat est issu du droit anglais, qui parle de « prenuptial agreement ». Comme on l’a dit, le contrat prénuptial a vocation à « réglementer » à l’avance et à l’amiable, par le biais de (s) avocat(s) des conjoints, les relations patrimoniales de ces derniers pour la période durant le mariage, et celle (si elle advient) qui commence au moment de la rupture du mariage.

Dès lors, est-ce la fin du compte commun ? De la communauté de biens ? Si aujourd’hui on se marie plus par amour que par intérêt, si de plus en plus de femmes ont conquis leur indépendance économique, la dissolution du mariage peut cependant être un choc financier frontal pour les deux partenaires. C’est pourquoi les Français se convertissent de plus en plus aux contrats prénuptiaux. C’est une façon de se soustraire aux règles standards du partage des biens familiaux (1), qui plus est, est reconnu dans la plupart des États du monde (2).

 

I) Le contrat prénuptial : une façon de se soustraire aux règles standards du partage des biens familiaux

L’usage des contrats prénuptiaux (A), est soumis à un certain nombre de conditions (B).

A) L’usage des contrats prénuptiaux

En général, le mariage crée l'obligation de partager la valeur des éléments d'actif acquis par les deux conjoints durant le mariage, et dans certaines provinces, la valeur des éléments d'actif acquis avant le mariage. C'est pourquoi bon nombre de couples signent un contrat prénuptial qui établit quels seront les droits et les obligations des deux partenaires - spécialement en ce qui concerne les biens et les prestations compensatoires - en cas de divorce.

L'utilisation d'un tel contrat est plus fréquente quand un ou les deux conjoints amènent dans le mariage un actif important, quand il s'agit d'un deuxième mariage et que l'un des conjoints a une obligation de soutien envers un ancien conjoint et ses enfants, ou encore quand l'un des conjoints est actif dans une entreprise familiale et que sa famille ne veut pas que son conjoint hérite d'une partie importante de l'entreprise après seulement quelques années de mariage.

Les contrats prénuptiaux se doivent de répondre aux objectifs de chacun des deux signataires. Des dispositions législatives et les Tribunaux imposent toutefois un certain nombre de limites. Par exemple, dans la plupart des provinces, les conjoints ne peuvent pas renoncer à leur droit de possession égale du foyer conjugal. Un Tribunal pourra même annuler, en partie ou en totalité, un contrat de mariage qui est jugé injuste ou abusif, particulièrement en ce qui concerne les obligations de soutien envers un enfant ou un conjoint.

B) Un contrat sous condition

Les contrats prénuptiaux ont plusieurs fonctions. Ils peuvent assurer la succession familiale. Ces contrats énoncent alors les actifs qu'un conjoint peut donner aux enfants ou autres membres de la famille en cas de décès. Dans le cas d'un divorce, ils suppriment les négociations ayant trait aux biens personnels (meubles, immeubles, argents…) cumulées par les futurs époux avant le mariage. Ils sont donc protégés, mais sous quelles conditions ?

Le contrat prénuptial est un contrat légal , notarié ou fait devant un avocat (acte d'avocat). Pour être exécutoire, celui-ci doit avoir été signé par les deux parties. Un notaire ou un avocat  sera témoin de la signature du contrat, et sera tenu d’en vérifier le contenu avant que les parties concernées ne le signent. Précisons que certains actes, comme les affidavits , les actes sous seing-privés et les procurations ne peuvent être juridiquement contraignants, sauf s'ils sont dûment authentifiés.

L’établissement d’un écrit est aussi nécessaire. Il garantit que tout ce qui est accepté par le couple peut s’appliquer en cas de décès ou divorce. Le contrat est alors juridiquement contraignant pour les deux parties. L’établissement d’un écrit est donc un moyen efficace pour éviter la fraude et garantir la bonne exécution du contrat. Enfin, le contrat prénuptial n'est légitime que s’il a été signé avant le mariage. Dès lors, lorsque deux personnes se marient et signent un contrat prénuptial, celui-ci sera alors considéré comme invalide, et ne pourra être exécuté devant le tribunal.

Avant d'envisager de signer un contrat prénuptial, il faut comprendre ce que ce type de contrat implique. Ceci – comme le mentionne l’affaire Gratino vs. Radmacher – est particulièrement important lorsque cet accord nécessite d'être validé dans un pays différent de celui où le contrat a été conclu et signé.

 

II) Le contrat prénuptial : reconnu dans la plupart des Etats du monde

Si la plupart des Etats du monde reconnaissent les contrats prénuptiaux , l’Angleterre fut pendant longtemps la capitale mondiale du divorce « bankable » (A). Mais l’affaire Gratino vs. Radmacher changea la donne (B).

A) La reconnaissance du contrat prénuptial par le Common Law

Aussi bizarre que cela puisse paraître, le Common Law ne reconnaissait pas les contrats prénuptiaux même entre Français ce qui permettait aux épouses de demander la moitié du capital de leur mari. Raison : la compétence des juridictions anglaises était fondée avant le Règlement Européen du Conseil du 27 novembre 2003 sur le lieu du domicile des époux. Depuis, c’est l’article 3 du règlement qui s’applique et en particulier l’article 3 (1) (b) qui donne entre autre compétence à l’Etat de la nationalité des deux époux, c'est-à-dire à la France lorsque les époux sont Français.

Cependant, l’article 19 (1) du règlement se permet de préciser que lorsque des demandes de divorce sont formées entre les mêmes parties devant des juridictions d’Etat membres différents, la juridiction saisie en second doit surseoir d’office à statuer jusqu'à ce que la compétence de la juridiction première saisie soit établie. Une fois établie, la juridiction saisie en second lieu se dessaisit en faveur de celle-ci. S’en suivaient, des courses de vitesse entre couples de Français pour saisir la juridiction française quand il y avait un contrat prénuptial…

Il faut savoir qu’en droit Anglais le droit qui s’applique est celui de la séparation des biens, c'est-à-dire que chaque époux n’est responsable que de ses dettes et garde ses biens acquis avant ou pendant le mariage avec les conséquences qui s’imposent, même en cas de décès .

Mais parce que le régime strict de séparation des biens pouvait être injuste envers un époux (surtout la femme) car il permettait à l’époux qui contrôlait les finances de tout mettre à son nom, ce régime ne s’applique plus qu’en cas de décès. C’est dans ce contexte que la Cour Suprême a, le 23 octobre 2010, rendu un arrêt estimant que la notion de contrat prénuptial n’était pas contraire à l’ordre public et qu’il liait les parties même si l’un des époux avait fait une mauvaise affaire.

B) L’affaire Gratino vs. Radmacher

En l’espèce, Nicolas Gratino, un Français fils de millionnaire, épouse Katrin Radmacher, une Allemande fille de millionnaire. A l’époque, Mr Gratino travaillait dans une banque et gagnait environ £300.000 par an. Mme Radmacher qui avait un petit business, gagnait elle, la somme de £2.000.000 par an. Quatre ans plus tard, Mr Gratino démissionne et commence un doctorat. Il gagne environ £30.000 par an, mais vit au-dessus de ses moyens. Mme Radmacher souhaite obtenir le divorce et effectue les démarches en Angleterre, lieu de résidence du couple. Mr Gratino demande £10.000.000 malgré le fait qu’il est signé un contrat prénuptial stipulant qu’en cas de divorce, les époux ne demanderaient rien l’un à l’autre.

En première instance, le juge applique le Common Law. Mr Gratino gagne et obtient £5.56 millions de pension alimentaire, £2.500.000 pour une maison et ses dettes de £700.000 payées. Mme Radmacher fait appel. La Cour d’Appel reconnaît le contrat prénuptial, et réduit la somme à £1.000.000 de pension alimentaire et £2.000.000 pour une maison. Mr Gratino fait appel devant la Cour Suprême. Mais la Cour estime que le contrat a été fait par les époux en pleine connaissance de cause. Mr Gratino reçoit £35.000 par enfant (soit £70.000) par an, et l’usage, sans payer de loyer d’une maison à Londres et d’une propriété en France pendant 14 ans jusqu'à ce que la plus jeune des filles atteigne 22 ans.

La conclusion de cette affaire est la suivante, les contrats prénuptiaux sont maintenant reconnus par le Common Law. C’est une excellente nouvelle pour tous ceux qui ont fait un contrat prénuptial. Le droit français paraît en effet plus juste car l’on sait avant de se marier ce qui va se passer en cas de divorce. Résultat : tout se passe beaucoup mieux qu’en Angleterre où le régime de la communauté de biens fait qu’il est très difficile pour un avocat de prédire comment le juge va diviser les biens de la famille.

Voilà pourquoi, avant de dire «Oui, je le veux», il convient d’examiner sa situation financière avec un planificateur financier professionnel afin d'être certain que l’on s’engage dans la bonne voie, du moins financièrement parlant…

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