RESPONSABILITE DU FAIT DES LIENS HYPERTEXTES

Pour faire supprimer un contenu qui bafoue vos droits, utilisez le service mis en place par le cabinet Murielle-Isabelle CAHEN.

/ Mars 2022 /

Avec l’arrivée du web 2.0 une nouvelle possibilité s’est ouverte par le biais des liens hypertextes. Ceux-ci permettent de créer un lien d’un site vers un autre, d’un contenu vers un autre contenu, c’est alors un outil qui apparaît aujourd’hui indispensable pour naviguer sur le net. Mais le problème c’est que ces liens peuvent permettre de s’approprier le travail d’autrui. En mettant en place un lien hypertexte, est-il possible d’engager sa responsabilité ?

Tout le monde peut être amené à créer un lien hypertexte et à en être responsable, et ce, pas forcément consciemment.

En effet, des sites comme Facebook , Instagram ou YouTube facilitent le partage de contenu.

Mais qu’est-ce que les liens hypertexte ? Les liens hypertexte  et leur responsabilité a été défini par la Commission générale de terminologie et de néologie comme un « système de renvois permettant de passer directement d’une partie d’un document à une autre, ou d’un document à d’autres documents choisis comme pertinents par l’auteur » Il faut cliquer cliquant sur le lien hypertexte caché dans un ou plusieurs mots, une icône, une image, etc.

Une page web peut en cacher une autre. Presque tous les sites web contiennent des liens hypertextes (appelés également hyperliens ou liens) qui, lorsque l’internaute clique dessus, redirigent ce dernier vers un nouveau contenu. Il peut s’agir, par exemple, d’un texte, d’une image voire d’une zone de la page ou d’un document à télécharger.


Besoin de l'aide d'un avocat pour un problème de contrefaçon ?

Téléphonez-nous au : 01 43 37 75 63

ou contactez-nous en cliquant sur le lien


Les liens hypertexte   et leur responsabilité sont aujourd’hui essentiels au fonctionnement du puisqu’ils permettent d’éviter de connaître et saisir l’adresse URL. Mais aucune loi ne leur est consacrée. Le responsable d’un site peut être responsable des liens qu’il établit ?

En l'absence d'une législation spécifique, le droit des liens hypertextes s'esquisse peu à peu grâce à la jurisprudence. Certaines décisions de justice avaient permis d'identifier certaines techniques et pratiques répréhensibles de tissage de liens hypertextes (liens "profonds", "framing", etc.). D'autres décisions se sont prononcées notamment sur la responsabilité du contenu du site cible dans le cadre de liens hypertexte.

La création d’un lien hypertexte vers un autre site que le sien n’est pas un acte anodin, puisque cela consiste à renvoyer sur un contenu édité par une autre personne. Peut-on donc renvoyer un internaute par un lien hypertexte vers un autre site sans respecter aucune règle ?

La seule référence se situe dans une directive européenne du 8 juin 2000 qui prévoyait un rapport examinant la situation des liens hypertextes. Des années après, le rapport n’a toujours pas été adopté.

En conséquence, le droit de la responsabilité du lien hypertexte se trouve consacré non pas dans la loi mais dans la jurisprudence. Celle-ci a défini le lien hypertexte comme étant « un simple mécanisme permettant à l’utilisateur en cliquant sur un mot ou un bouton de passer d’un site à un autre».

Si la navigation sur le web consiste dans tous les cas à joindre une page identifiée par son adresse URL (Universal Resource Locator), l’internaute dispose pour ce faire de deux moyens distincts. Le premier, le plus compliqué, est la saisie directe de l’adresse du site visé. Le second, plus simple, a assuré le succès du net et est devenu indispensable à la navigation : le lien hypertexte.

Les réseaux informatiques en exploitent toutes les possibilités, en faisant des liens  hypertextes de  page de site à une autre page d’un autre site dans et entre les sites.(liens hypertextes internes et liens externes) Certains sites utilisent les liens hypertextes pour référencer les autres sites et, surtout, permettre de s’y connecter facilement : les annuaires et les moteurs de recherche.

Les annuaires se construisent par un référencement manuel des sites. Les moteurs le font de façon automatique par des logiciels.

I. LES PROBLEMES SOULEVES PAR LES LIENS HYPERTEXTES

La nétiquette conseille d'avertir le propriétaire du site qu'on aimerait lier à son site. C'est une règle qui est un peu tombée en désuétude. Le propriétaire du site référencé voit sa notoriété augmenter au fil des liens . Mais il faut qu'il puisse être identifié !! En effet, les liens peuvent aussi servir à s'approprier le travail d'autrui. Il y a différentes façons de créer des liens d'un site vers un autre qui peuvent s'apparenter à de la contrefaçon .

A) Le framing

Cette méthode permet d'afficher n'importe quel document disponible sur Internet dans l'une des fenêtres de sa page personnelle. Cette technique substitue donc l'adresse du site principal à celle du site lié, dans la barre du navigateur.

Les œuvres n'ont pas été à proprement parlé reproduites, elles ont été simplement appelé par un code informatique. Néanmoins, l'auteur du site lié peut rappeler que selon l'article L. 122-4 du Code de la propriété intellectuelle, le simple fait de "représenter "des œuvres sans le consentement de l'auteur est répréhensible.

B) Liens hypertextes hors-contexte

Les auteurs de sites font souvent des liens vers des sites qui eux font de la contrefaçon. Il n'y apas délit de contrefaçon même s' il y a passage dans la mémoire cache de l'ordinateur.

Si le lien pointe vers une page secondaire du site, il peut y avoir atteinte à l'intégrité du site et donc contrefaçon.

Si des liens sont faits vers un site d'une grande marque, il peut aussi y avoir contrefaçon. Ainsi si un site d'un petit fabriquant de vêtement pointe vers le site de Channel, ce lien pourrait constituer une contrefaçon par utilisation et usage parasitaire. Ce ne serait pas le cas d'un lien vers le site de Channel partant d'un site sur les différentes tendances de la mode.

Le tribunal de Commerce de Paris s'est prononcé le 26 décembre 2000 sur le deep-linking et a décidé qu'il constituait un agissement déloyal et parasitaire condamnable sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil français.

Des liens hypertextes peuvent aussi faire l'objet de dénigrement si ces liens vers un site concurrent sont accompagnés de commentaires désobligeants.

Ce type de liens pourrait être considéré comme de la concurrence déloyale par dénigrement.

Les liens vers des sites d'entreprises concurrentes peuvent être considéré comme de la publicité comparative illicite .

C) Liens-hors-la-loi

Si vous placez des liens de votre site vers un site révisionniste ou à connotation pédophile êtes-vous coupable de cette infraction par complicité ?

En fait, s'il s'agit d'un lien direct, l'infraction est constituée et le code pénal français pourrait s'appliquer.

S'il s'agit de liens indirects, il n'y a pas de responsabilité pénale, sauf à prouver que l'auteur des liens avait connaissance du fait que les liens de son site renvoyaient indirectement à de sites illicites .(Un lien indirect est une succession de liens pointant de sites en sites .)

Il vaut donc toujours mieux avoir un accord écrit, même si uniquement par mel, de l'auteur du site vers lequel un lien est créé.

 

II. LES SOLUTIONS FRANCAISES

Les tribunaux français n'ont rendu de décision, pour le moment, que dans des hypothèses de liens vers des sites jugés illégaux :

Le tribunal correctionnel d'Epinal a rendu une décision le 24 octobre 2000 : un site Internet mettait à la disposition des visiteurs des fichiers MP3 en violation des droits d'auteurs. L'auteur du site a été condamné à 4 mois de prison avec sursis et à 20.000 F de dommages-intérêts. Le site ne proposait cependant que des liens vers ces sites illicites et n'hébergeait pas les fichiers mp3 eux-mêmes.

Le tribunal correctionnel de Saint-Etienne avait rendu le 6 décembre 1999 le même type de décision.

La loi française n’a pas mis en place pour le moment une réglementation spécifique concernant les liens hypertexte. Il a donc fallu que les juridictions encadrent et sanctionnent les abus que cela pouvait engendrer. La Cour de cassation considère que les liens hypertextes constituent une reproduction du premier message.

A ce titre le  lien hypertexte fait courir un nouveau délai de prescription de trois mois à partir du moment où il est mis en ligne. Ainsi si le premier comportait un contenu illégal, l’auteur du lien renvoyant à ce contenu pourrait être sanctionné. Il faut cependant se demander si l’auteur du lien a approuvé le contenu en question ou s’il l’a juste mentionné (cass crim. 1er septembre 2020 pourvoi n° 19-84.505).

Par ailleurs, en matière de diffamation, la Cour de cassation a rendu, le 01 septembre 2020, aborde la question de la responsabilité pénale de l’auteur d’un lien hypertexte.

En l’espèce, un membre d’une association avait été exclu de cette dernière en raison d’accusations de viol à son encontre. L’exclusion et le motif ont fait l’objet d’un communiqué publié sur le site Internet cette association. En outre, le syndicat de la personne accusée de viol publie à son tour un communiqué critiquant cette mesure d’exclusion.

Ensuite, ces deux communiqués ont été reproduits intégralement sur un site internet tiers et qui a fait l’objet d’un lien hypertexte dans une publication Facebook d’une élue locale. A cet effet, ce dernier agit en justice contre l’élu et obtient gain de cause auprès du tribunal correctionnel et de la Cour d’appel pour diffamation.

La Cour de cassation avait rendu un arrêt infirmatif dans lequel elle reproche à la Cour d’appel d’avoir reconnu la culpabilité de l’auteur du lien hypertexte sans examen préalable des modalités et du contexte en vertu desquelles avait été inséré le lien hypertexte qui renvoie au contenu diffamatoire. Ainsi, la Cour accorde aux juges un pouvoir d’appréciation souverain quant au contexte inhérent au partage du lien hypertexte en question. (1)

III. LES SOLUTIONS ETRANGERES

A) Les questions de propriété intellectuelle :

USA l'affaire "Total News": en utilisant la technique du "framing", la société Total News profitait du contenu de nombreux sites journalistiques. Les parties ont conclu un accord obligeant Total News à mentionner la source des documents liés.

Pays-Bas : Une société exploitait un site web " Kranten.com " sur lequel on trouvait essentiellement une sélection de titre d'articles de journaux.

Un éditeur hollandais de quotidiens, PCM, a saisi la justice, s'estimant lésé par l'activité de deep-linking de " Kranten.com ". Il invoquait le fait que l'accès aux articles par deep-linking lui était préjudiciable dans la mesure où les visiteurs ne passaient plus par la page d'accueil. En conséquence, l'espace publicitaire situé sur cette page était moins rentable car la page était moins fréquentée.

Les juges ont conclu le 22 août 2000 à la légalité du deep-linking dans cette hypothèse, en se basant sur une disposition néerlandaise proche de l'exception de revue de presse française.

B) Les cas de liens vers des sites jugés illicites

Belgique : Le tribunal de commerce de Bruxelles a condamné, le 2 novembre 1999, un hébergeur à retirer de ses serveurs des liens hypertextes placés sur certaines pages hébergées au motif qu'ils renvoyaient vers des fichiers illégaux (MP3).

Belgique : Le tribunal de première instance d'Anvers a condamné, le 21 décembre 1999, le propriétaire d'un site qui comprenait plus de 25.000 liens vers des fichiers MP3 illégaux, sur la base de l'article 1382 du code civil belge qui est le même que celui du code civil français.

Allemagne : Une décision du 12 mai 1998 d'un tribunal de Hambourg a retenu la responsabilité délictuelle d'une personne qui avait établi une compilation de liens hypertextes vers des informations en ligne portant atteinte à l'honneur d'une autre personne.

Etats-Unis : Dans l'affaire " Ticketmaster Corp. v. Tickets.com ", la federal district court de Los Angeles a considéré, le 27 mars 2000, qu'un lien hypertexte ne pouvait pas en tant que tel violer le droit d'auteur d'autrui. Dans ce cas ce lien serait assimilable à une référence bibliographique indiquant uniquement le lieu de l'œuvre recherchée.

Etats-Unis : Dans des affaires où des sites offraient des liens vers un programme permettant de décrypter les protections des DVD, des solutions contradictoires ont été rendues en fonction des états : la cour supérieure de Californie a refusé, le 20 janvier 2000, d'interdire ces liens, et la cour du district sud de New-York a interdit ces liens le 17 août 2000, en se basant sur le Digital Millennium Copyright Act de 1998.

Canada : Dans l’affaire Crookes v Newton de 2011, la Cour suprême du Canada a statué qu'un hyperlien en soi ne constitue pas une publication de matériel diffamatoire, et que la poursuite en diffamation de Crookes devrait être rejetée parce que les hyperliens sur le site Web de Newton vers d'autres contenus prétendument diffamatoires n'étaient pas une « publication » de matériel diffamatoire. Elle rajoute, par ailleurs, qu’un lien hypertexte qui renvoie vers un site, dans lequel un contenu protégé a été légalement partagé, n’est pas une reproduction en soi et par conséquent ne porte pas atteinte aux droits d’auteur. (2)

Europe : le 8 septembre 2016, la Cour de justice européenne a été saisie d’une question préjudicielle qui avait pour objet la validité d’un lien hypertexte qui faisait référence à une œuvre dont la mise en ligne n’avait pas été autorisée par l’auteur initial. L’affaire portait sur un site internet qui contenait des liens hypertextes qui renvoyaient à des photos. Cependant leur mise en ligne n’avait pas été autorisée par l’auteur.

L’article 3 de la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information dispose que « les États membres prévoient pour les auteurs le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire toute communication au public de leurs œuvres, par fil ou sans-fil y compris la mise à la disposition du public de leurs œuvres de manière que chacun puisse y avoir accès de l’endroit et au moment qu’il choisit individuellement ».

Dans l’arrêt en question la CJUE affirme que le fait de placer sur un site des liens hypertexte constituait une communication au public. La cour distingue entre deux situations selon que la mise en ligne du lien litigieux ait un but lucratif ou non. Si cette mise en ligne n’avait aucun but lucratif alors il est présumé que l’auteur de cette communication ne connaissait pas son caractère illégal. En revanche si cette mise en ligne avait été effectuée dans un but lucratif alors son auteur doit vérifier que la publication sur le site vers lequel le lien renvoi n’est pas illégale.

CONCLUSION: On observe que dans l'ensemble, les solutions françaises et étrangères sont relativement cohérentes, les Etats-Unis se situant un peu à part notamment car ils ne reconnaissent pas en tant que tel le droit d'auteur.

Mais les décisions semblent toutes aller vers une responsabilité de l'auteur du lien, que ce soit un lien vers un site illégal ou bien un lien vers des pages en violation du droit d'auteur.

Ces techniques peuvent être contournées néanmoins sans difficulté aucune par la cible, tout au moins en ce qui concerne celui qui subit le framing : il suffit de rajouter les lignes suivantes de code dans le corps de la page htm, après la balise Body :

SCRIPT LANGUAGE="JavaScript" if (top.frames.length!=0) {top.location=self.document.location;} /SCRIPT(en refermant bien les parenthèses des balises)

_____________________________________________________________________________

Faites appel à notre cabinet d'avocats en cas de doutes ou de demande d'éclaircissements, nous sommes à votre disposition : téléphone : 01 43 37 75 63

___________________________________________________________

Surces

(1)    : Cass. crim., 1er septembre 2020, n°19-84.505
(2)    : https://digitalcommons.wcl.american.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1107&context=ipbrief

https://globalfreedomofexpression.columbia.edu/cases/crookes-v-newton/

ARTICLES QUI POURRAIENT VOUS INTERESSER :

retour à la rubrique 'Autres articles'

Cet article a été rédigé pour offrir des informations utiles, des conseils juridiques pour une utilisation personnelle, ou professionnelle.

Il est mis à jour régulièrement, dans la mesure du possible, les lois évoluant régulièrement. Le cabinet ne peut donc être responsable de toute péremption ou de toute erreur juridique dans les articles du site.

Mais chaque cas est unique. Si vous avez une question précise à poser au cabinet d’avocats, dont vous ne trouvez pas la réponse sur le site, vous pouvez nous téléphoner au 01 43 37 75 63.

| Conditions d'utilisation du site: IDDN | | Contacts | Plan d'accès | English version |
| C G V | Sommaire | Plan | recherche | Internet | Vie des sociétés | Vie quotidienne | Services en ligne | Votre question? |
Nous joindre - Tel : 0143377563
En poursuivant votre navigation sur notre site, vous acceptez le dépôt de cookies qui nous permettront de vous proposer des contenus intéressants, des fonctions de partage vers les réseaux sociaux et d'effectuer des statistiques. Voir notre politique de gestion données personnelles.
Partager
Suivre: Facebook Avocat Paris Linkedin Avocat Paris Tumblr Avocat Paris Twitter Avocat Paris Google+ Avocat Paris App.net portage salarial RSS Valide!
Retour en haut