LA PROTECTION DU LOGICIEL PAR LE DROIT D’AUTEUR
/ Juin 2024 /
Le logiciel occupe aujourd’hui une place importante de l’économie numérique, en effet, celui-ci est embarqué dans de nombreuses machines, il est devenu indispensable.
C’est pourquoi il est apparu nécessaire de savoir quelle protection était accordée au logiciel, or la réponse à cette question n’était pas évidente, puisque l'on pouvait hésiter entre une protection accordée via le droit des brevets, le droit d’auteur, ou encore créer un régime propre au logiciel. C’est finalement la protection par le droit d’auteur qui a été choisie.
Il convient d’abord de définir ce qu’est un logiciel. Si le Code de la propriété intellectuelle n’apporte pas de définition arrêtée en la matière, la Commission de terminologie française a apporté des précisions quand au terme de logiciel, dans des travaux publiés au journal officiel du 17 janvier 1982. Elle retenait la définition suivante : « Logiciel, n. m. : Ensemble des programmes, procédés et règles et éventuellement de la documentation relatif au fonctionnement d’un ensemble de traitement de données ».
Un logiciel, appelé aussi « Software », est un produit actif qui se caractérise principalement par ses fonctionnalités, ou sa structure externe, alors qu’un programme informatique (Computer program) se caractérise par sa structure interne et peut ne consister qu’en un listing de données. La différence est, toutefois, très importante car l’objet de la protection n’est pas le même dans l’un et l’autre cas.
La loi française est une des rares avoir opté pour le terme de « logiciel », alors que les législations étrangères (Royaume-Uni, Japon, Allemagne ou les États-Unis) ont préféré celui de « programme informatique ».
La directive européenne, qui vise les programmes d’ordinateur, pose dans son préambule que le terme « programme d’ordinateur » comprend les travaux préparatoires de conception du logiciel aboutissant, ainsi, au développement d’un programme, à condition qu’ils soient de nature à permettre la réalisation d’un programme à un stade ultérieur.
On sait, par ailleurs, que le droit d’auteur recoupe l’ensemble des droits moraux et patrimoniaux dont dispose l’auteur d’une « œuvre de l’esprit » (de sa création, somme toute) sur celle-ci. Le Code de la propriété indique cette fois-ci, en son article L112-2, les œuvres encadrées par la protection accordée par le droit d’auteur, parmi lesquelles on compte les logiciels.
La
Cour de justice de l’Union européenne, dans un arrêt du 7 octobre 2021 (CJUE,
6 oct. 2021, no C-13/20),
a précisé que l’acquéreur d’un
programme d'ordinateur
peut décompiler tout ou partie de celui-ci pour corriger des erreurs affectant
son fonctionnement, y compris lorsque la correction implique la désactivation
d’une fonction perturbant le bon fonctionnement de l’application contenant le
programme. (12)
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Le logiciel est protégé en France par le droit d’auteur.
Toutefois le choix de la protection par le droit d’auteur n’a pas toujours été évident.
En effet le législateur hésitait entre la protection du logiciel par le droit des brevets, une protection par le droit d’auteur, ou encore à une protection par un droit intellectuel spécifique.
Ces hésitations provenaient de la nature ambivalente du logiciel, celui-ci faisant appel à des notions de brevets par son aspect technique, mais aussi au droit d’auteur en ce qu’il constitue une œuvre du langage.
Les Etats-Unis ont été les premiers à choisir la voie du copyright.(notion équivalente au droit d’auteur pour les pays de common law). En France, c’est en 1985 avec la loi Lang que « l’adoption » du logiciel sous l’égide de la protection du droit d’auteur s’est faite. Pour compléter cette affirmation, la Cour de cassation venait d’ailleurs appliquer rétroactivement cette protection du droit d’auteur aux logiciels antérieurs par un arrêt rendu l’année suivante (Cass plén., Arrêt « Pachot », 1986).
Même si le législateur a choisi le droit d’auteur pour assurer la protection du logiciel, celui-ci a été adapté au logiciel de façon à appréhender l’aspect technique de la notion de logiciel.
I / Le choix de la protection par le droit d’auteur
A / Les raisons de l’exclusion du droit des brevets
Le droit des brevets apparait à première vue intéressant pour la protection des logiciels, car il pourrait avoir l’intérêt de protéger les fonctions d’un logiciel.
Toutefois en France le débat a été tranché dès 1968 avec l’adoption de la loi du 2 janvier 1968 qui expliquait le refus de l’application du droit des brevets au logiciel par son inaptitude à remplir le caractère industriel exigé pour les inventions brevetables.
Par ailleurs le choix de ne pas opter pour le droit des brevets s’explique par des motifs économiques et techniques.
En effet le législateur a craint que les Etats Unis inondent le marché français de demande de brevet et qu’ils bloquent ainsi la recherche française.
Du point de vue de la technique juridique il aurait de plus difficile pour les praticiens d’apprécier l’état de la technique antérieure en matière de logiciel, les conditions de nouveauté et de l’activité inventive étant nécessaire pour prétendre à la brevetabilité d’une invention.
Enfin lors du dépôt d’un brevet il est nécessaire de rédiger des revendications d’ordre technique pour délimiter le champ de la protection accordée, or la rédaction de ces revendications se serait avéré très complexe dans le cadre du logiciel.
C’est pour ces raisons que l’article L 611-10 du Code de la propriété intellectuelle prévoit l’exclusion explicite de brevetabilité des logiciels.
Toutefois l’exclusion de brevetabilité n’est pas absolue.
En effet, pour qu’une invention soit brevetable, elle doit remplir plusieurs conditions cumulatives, à savoir : une invention nouvelle (une invention qui n’est pas comprise dans l’état de la technique), une invention impliquant une activité inventive, une invention licite, et enfin, une invention susceptible d’application industrielle. En vertu de l’article L. 611-15 du code la propriété intellectuelle, une invention est considérée comme susceptible d’application industrielle si son objet peut être fabriqué ou utilisé dans tout genre d’industrie, y compris l’agriculture.
En effet l’article L 611-10 CPI n’exclut le logiciel de la brevetabilité « qu’en tant que tel ».
Cela signifie que le logiciel ne peut pas être déposé que s’il est revendiqué en tant que tel, mais qu’il devient brevetable lorsqu’il est intégré à une invention plus globale. Ainsi, bien qu’un algorithme ou un logiciel ne soit pas brevetable, en tant que tel, il le devient s’il constitue une étape importante dans un processus industriel et/ou dans le fonctionnement d’un système (1). Ce principe a été consacré, en matière de logiciel, dans l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris dans l’affaire « Schlumberger » :
« La disposition légale qui proscrit la brevetabilité des programmes est une disposition exceptionnelle qui doit faire l’objet d’une interprétation restrictive (…) les modifications intervenues à ce sujet en 1978 précisent que seuls les programmes d’ordinateurs pris en tant que tels sont exclus.
Un procédé ne peut être privé de la brevetabilité pour le seul motif qu’une ou plusieurs de ses étapes sont réalisées par un ordinateur devant être commandé par un programme. Une telle solution aboutirait en effet à exclure du domaine de la brevetabilité la plupart des inventions importantes récentes qui nécessitent l’intervention d’un programme d’ordinateur et une telle solution aboutirait à des résultats aberrants sur le plan pratique ». (2)
La loi exclut donc de la brevetabilité les logiciels en tant que tels et non les machines ou les systèmes, dont une ou plusieurs étapes sont mises en œuvre par un logiciel, comme le précisent les directives de l’Office européen des brevets (OEB).
Enfin l’avantage de la protection par le droit d’auteur est que celle-ci est acquise sans aucune formalité de dépôt, contrairement au brevet qui implique un dépôt entraînant un certain coût, soit auprès de l’Institut national de la propriété intellectuelle pour bénéficier d’une protection sur le territoire national, soit auprès de l’Office européen des brevets (OEB) pour bénéficier d’une reconnaissance d’une brevetabilité de l’invention et à la possibilité de faire une validation nationale dans tout ou partie des États membres.
L’article L 111-2 CPI dispose en effet que « l’œuvre est réputée créée indépendamment de toute divulgation publique du seul fait de la réalisation même inachevée de la conception de l’auteur ».
B / La notion de logiciel
Le législateur n’a pas précisé la notion de logiciel, cet oubli est volontaire dans la mesure où il ne voulait pas enfermer le logiciel dans « un carcan législatif » et permettre une adaptation plus efficace du droit d’auteur au logiciel.
C’est donc la jurisprudence qui a délimité les contours de la notion.
Du point de vue technique le logiciel se définit comme un processus comprenant deux phases, à savoir une phase d’analyse et une phase de programmation.
La phase d’analyse se distingue entre l’analyse fonctionnelle et l’analyse organique.
L’analyse fonctionnelle sert à décomposer le futur logiciel en différents tâches que l’on explicite.
L’analyse organique consiste, elle, à établir la structure du futur logiciel en un ensemble de programmes et sous programmes correspondant à l’analyse fonctionnelle, et en tenant compte du matériel sur lequel le logiciel sera installé.
La phase de programmation consiste enfin à rédiger des instructions dans un langage informatique, ce qui se concrétise par le passage du code source au code objet, qui permet de passer à une version automatisable par l’ordinateur de la solution donnée.
On distingue le logiciel d’application du logiciel d’exploitation.
Leur différence tient dans leur nature et leur fonctionnalité.
En effet le logiciel d’exploitation est à la base de tout ordinateur car il en permet l’utilisation et organise le fonctionnement de la machine.
Tandis que le logiciel d’application ne sera qu’une fonctionnalité incluse dans l’ordinateur, sachant qu’il doit être forcément conçu en étant compatible avec le logiciel d’exploitation et avec l’ordinateur sur lequel il sera installé.
II / L’adaptation du droit d’auteur au logiciel
A / Les éléments du logiciel protégeables par le droit d’auteur
Dans le cadre de l’application du droit commun de la propriété intellectuelle, les idées ne sont pas protégées en droit français.
En effet, selon un célèbre adage attribué à Henri Debois, « les idées sont par essence et par destination de libre parcours ». Les idées doivent librement circuler dans nos esprits. L’exclusion de la protection des idées se justifie par la volonté de ne pas bloquer la création ni entraver la libre concurrence.
Or certains éléments du logiciel sont assimilés aux idées.
C’est le cas des algorithmes et des fonctionnalités du logiciel.
Toutefois, il convient de noter que la Cour de Justice de l’Union européenne a précisé, dans une décision, que « ne sont pas protégeables des fonctionnalités de logiciel. En effet, admettre que la fonctionnalité d’un programme d’ordinateur puisse être protégée par le droit d’auteur reviendrait à offrir la possibilité de monopoliser les idées, au détriment du progrès technique et du développement industriel » (CJUE, SAS Institue c/ World Programming).
Un des éléments protégeables par le droit d’auteur est d’une part le matériel de conception préparatoire.
L’article L 111-2 du CPI dispose en effet que la protection est accordée au logiciel y compris son matériel de conception préparatoire.
Cela recouvre l’ensemble des travaux de conception aboutissant au développement d’un programme de nature à constituer un logiciel à un stade ultérieur.
C’est dans ce concept de « matériel de conception préparatoire » que se situent les analyses fonctionnelles et organiques, qui sont donc protégées.
Le deuxième élément protégé est le programme.
Par programme source, on entend la liste des instructions qui composent le logiciel. Pour déterminer s’il y a contrefaçon d’un programme source, les experts le comparent avec celui du logiciel contrefaisant afin d’établir le nombre de lignes identiques des deux programmes. Dans beaucoup de cas, comme dans l’affaire « Apple c/ Segimex » où l’expert a noté que l’on retrouvait 99,7% des instructions du programme source du logiciel de base de l’Apple dans le logiciel de base du Golem.
Concernant le programme objet, la jurisprudence n’a jamais douté de l’application du droit d’auteur aux programmes objet, c’est-à-dire à l’enregistrement ou à la transcription en code binaire, sur bande, disque ou disquette magnétiques ou à l’intérieur d’une mémoire de types « ROM », du programme source d’un logiciel.
Le droit d’auteur protège les œuvres quelle que soit leur forme, et la doctrine et la jurisprudence française ne voient dans le programme objet qu’une traduction du programme source en langage codé magnétiquement.
La protection des programmes est logique puisqu’ils sont au cœur même de la notion même de logiciel.
Les programmes recouvrent le code source et le code objet du logiciel.
Le troisième élément protégé est la documentation d’utilisation.
Le statut du cahier des charges, et des informations qu’il contient, est normalement réglés par les dispositions du contrat de développement de logiciel. Mais, même en l’absence de dispositions contractuelles, commets un acte de concurrence déloyale la SSII ou le constructeur qui utilise pour son compte un cahier des charges ou d’autres informations techniques qui lui ont été communiquées par un client dans le cadre de relations contractuelles. (3)
La
chambre commerciale, dans un arrêt du 6 mars 2024 (Cass. com., 6 mars 2024, no 22-23657,)
a précisé que la mise à disposition d’un
logiciel par
téléchargement accompagnée de la conclusion d’un contrat de licence
d’utilisation permettant au client d’utiliser cette copie de manière permanente
moyennant un paiement, implique le transfert de la propriété de cette copie.
(14)
Cependant, le réalisateur demeure libre d’utiliser le « savoir-faire général » acquis par l’étude du cahier des charges, mais par prudence, il aura intérêt à le mentionner spécifiquement dans le contrat de commande.
Le quatrième élément du logiciel bénéficiant de la protection est la page-écran. Elle consiste en la manifestation graphique du logiciel, passant par des dessins, des icônes, etc.
Enfin, d’autres éléments du logiciel pouvant faire l’objet d’une protection par le droit d’auteur sont : les interfaces techniques et fonctionnelles, le manuel d’utilisation et documents commerciaux, le titre des logiciels, etc.
B / Les droits moraux et patrimoniaux du créateur
Concernant les droits patrimoniaux, l’article L 122-6 du CPI prévoit trois prérogatives au bénéfice de l’auteur d’un logiciel, à savoir un droit de reproduction, de modification et de mise sur le marché.
Le droit de reproduction applicable au logiciel va au-delà du droit commun.
En effet il permet à l’auteur d’avoir un monopole sur la fixation de l’œuvre sur tout support qui en permet la communication au public.
Contrairement au droit d’auteur classique, ce droit implique pour l’auteur du logiciel d’être protégé à la fois contre la reproduction permanente de son logiciel, mais aussi contre toute reproduction provisoire.
On considère que la reproduction est permanente lorsque le logiciel en conserve la copie, et qu’elle est provisoire lorsque le logiciel est reproduit dans la mémoire vive de l’ordinateur.
Le droit de modification permet quant à lui à l’auteur du logiciel de s’opposer à la traduction, l’adaptation, l’arrangement ou toute autre modification de son logiciel.
Ces actes nécessitent en effet l’autorisation de l’auteur du logiciel, sous peine d’être déclaré contrefacteur.
Enfin le droit de mise sur le marché est totalement étranger au droit d’auteur classique.
En effet, l’article 4 de la directive européenne sur la protection juridique des programmes d’ordinateurs dispose que : « La première vente d’une copie d’un programme d’ordinateur dans la Communauté par le titulaire du droit ou avec son consentement épuise le droit de distribution de cette copie dans la Communauté ».
Ce principe figure aussi à l’alinéa 3 de l’article L. 122-6 du CPI qui dispose que : « La première vente d’un exemplaire d’un logiciel dans le territoire d’un État membre de la Communauté européenne ou d’un État parti à l’accord sur l’Espace économique européen par l’auteur ou avec son consentement épuise le droit de mise sur le marché de cet exemplaire dans tous les États membres à l’exception du droit d’autoriser la location ultérieure d’un exemplaire ».
Cela signifie que l’auteur dispose du droit de mettre son logiciel sur le marché à titre onéreux ou gratuit.
Il existe toutefois une limite à ce droit dans la mesure où la première vente d’un logiciel dans un Etat membre de la communauté européenne, par l’auteur ou avec son consentement, épuise le droit de mise sur le marché de cet exemplaire dans tous les Etats membres.
Le logiciel étant considéré comme une marchandise, il est logique qu’on lui applique le principe communautaire de libre circulation des marchandises.
La location reste cependant réservée à l’auteur même lorsqu’il y a eu une première vente dans un Etat membre.
Concernant les droits moraux, là aussi le droit d’auteur s’est adapté au logiciel notamment en paralysant certaines attributions qui font en principe partie des attributions de l’auteur au titre de ses droits moraux.
La finalité de la limitation est d’éviter un exercice débridé de ces droits, notamment parce qu’ils sont perpétuels alors que les droits patrimoniaux courent jusqu’à 70 ans après la mort de l’auteur, puisse nuire à la commercialisation des logiciels.
L’auteur du logiciel conserve le droit de divulgation et le droit à la paternité de l’œuvre.
Selon un arrêt rendu par la Cour d’appel de Douai, « le droit moral du programmeur, par interprétation a contrario de l’article L. 127-7 du CPI, se réduit en matière de progiciel au droit au nom . » (4). Cela sous-entend qu’il suffit que le nom de l’auteur soit crédité sur l’écran de l’ordinateur lors de la mise en route du logiciel, pour que son droit au respect soit respecté. Le nom de l’auteur doit donc être mentionné.
Le droit au respect de l’œuvre est toutefois limité dans la mesure où un auteur ne peut pas s’opposer à la modification du logiciel par le cessionnaire des droits patrimoniaux si elle n’est pas préjudiciable à son honneur ou à sa réputation.
Ce droit consiste pour l’auteur à pouvoir s’opposer à une dénaturation de son œuvre.
En droit d’auteur classique, il n’est pas nécessaire de prouver une atteinte à son honneur ou à sa réputation pour pouvoir invoquer son droit au respect de l’œuvre.
Enfin le droit de retrait, ou droit de repentir, est totalement paralysé en matière de logiciel.
Ce droit consiste au fait que l’auteur peut en principe à tout moment décider d’arrêter la divulgation de son œuvre.
III / Protection des logiciels autres que par le droit d’auteur
A – Protection par le droit des dessins et modèles
Un logiciel peut bénéficier de la protection par le droit des dessins et modèles, dans son aspect télévisuel si l’on suit la logique du Livre V du CPI (an. L. 14 juill. 1909).
En pratique, l’aspect télévisuel de nombreux jeux vidéo fait l’objet de dépôt, au titre des dessins et modèles, à l’INPI. Toutefois, sont exclus de la protection accordée par le Livre V les dessins dont la forme est inséparable de leur fonction par leur fonction. Enfin, ne sont protégés que les dessins « nouveaux » : ainsi, la protection de la loi a été refusée à un jeu vidéo ayant le même aspect télévisuel que des jeux existants antérieurement. (5)
B – Protection des logiciels par le droit des marques
La marque fait l’objet d’une protection autonome qui élargit l’arsenal juridique à la disposition des créateurs de logiciels. Par exemple : en cas de piratage par des distributeurs, il y aura également contrefaçon de marque (6). Mais le dépôt de la marque ne confère que des droits sur celle-ci et non sur le logiciel lui-même. (7)
C – Protection des logiciels par le droit pénal
L’appropriation frauduleuse d’un logiciel est susceptible de tomber sous le coup d’une large variété de lois pénales (vol, abus de confiance, corruption active ou passive d’employé, violation de secret professionnel, divulgation de secret de fabrique). (8). D’ailleurs, il a déjà été jugé que constituait :
« Le délit de vol prévu par le Code pénal la copie d’un logiciel spécifique par un employé à l’insu de son employeur. » (9)
La
chambre criminelle dans un arrêt du 9 mars 2021 (Cass. crim., 9 mars 2021, no 20-90034)
, a refusé de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité portant
sur la conformité de l’article L335-3 alinéa 2 du CPI au principe de légalité
des délits et des peines au motif que cet article serait dénué de caractère
sérieux. Cet article prévoit que « Toute édition d'écrits, de composition
musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou
gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la
propriété des
auteurs,
est une contrefaçon et toute contrefaçon est un délit. »
(15)
IV / Sanctions de la contrefaçon de logiciels
L’alinéa 1er de l’article 6 de la directive européenne sur la protection juridique des programmes d’ordinateur dispose que :
« Le fait d’importer, de posséder ou de prendre en charge une copie illicite d’un programme d’ordinateur en sachant ou en ayant de bonnes raisons de croire qu’il s’agit effectivement d’une copie illicite constitue une infraction aux droits exclusifs de l’auteur sur ce programme. »
En matière pénale, la contrefaçon est punie par l’article L. 335-2 du CPI qui, depuis la loi du 29 octobre 2007, prévoit une peine d’emprisonnement de trois ans et 300 000 euros d’amende. Il est plus courant de voir une peine de dix-huit mois de prison avec sursis avec des dommages-intérêts. (10)
En matière civile, le contrefacteur peut être condamné non seulement à la confiscation des logiciels contrefaits, à celui du matériel utilisé pour la contrefaçon, à la publication du jugement dans diverses revues professionnelles, mais surtout au paiement de dommages et intérêts destinés à compenser le préjudice subi.
L’attribution de dommages et intérêts est généralement effectuée d’une manière stricte, sur le fondement du gain manqué ou de la perte du chiffre d’affaires, compte tenu des éléments commerciaux fournis par le demandeur. Sur cette base, il a cependant été attribué au demandeur près de 1 500 000 euros de dommages et intérêts, ainsi que près de 15 000 euros en remboursement des frais d’avocats au titre de l’article 700 du C. pr. Civ. (11)
La
cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 8 décembre 2023 (CA Paris, P. 5, ch. 2,
8 déc. 2023, no 21/19696)
a précisé que l’éditeur d’un logiciel peut valablement intenter une
action en
contrefaçon à
l’égard d’un cocontractant pour bénéficier des garanties de la directive
2004/48/CE du 29 avril 2004 tenant à l’évaluation des dommages et intérêts et à
la saisie réelle des marchandises prétendument contrefaisantes.(13)
Popur lire une version plus adaptée aux mobiles de cet article sur la contrefaçon de logiciel, cliquez
Sources :
1.
Ch. Le Stanc,
« Exclusions de brevetabilité règles relatives au logiciel »
J.-cl. brevets, fasc. 155
J.-P. Martin, « La <
protection > des < logiciels > informatiques : droit d’auteur ou brevet
d’invention ?
2.
CA Paris, 4e ch., 15 juin 1981
3.
Com. 3 juin 1986, no 84-16.97
4.
CA Douai, 1re ch., 1er juill. 1996, PIBD 1993, III, 129 qui alloue l’équivalent
de 3 000 euros pour l’atteinte portée au droit au nom de l’auteur.
5.
T. corr. Nanterre, 15e ch., Coreland c/ Fama
6.
TGI Paris, 3e ch., 9 mars 1984
7.
CA Versailles, 3e ch., 21 avr. 1989, Rigoult c/ Verveer, Juris-data no 43864
8.
J.-L. Goutal, « La < protection > pénale des < logiciels > », Exp. 1986, no 80,
p. 2
9.
TGI Montbéliard, 26 mai 1978, Peugeot c/ X, Exp. 1978.
10.
TGI Paris, 31e ch., 19 mars 1990 GST c/ E., Cah. dr. Auteur 1990
11.
TGI Paris, 3e ch., 13 févr. 1989, Sisro c/ Ampersand, Exp. 1989.
12.
CJUE, 6 oct. 2021, no C-13/20
https://curia.europa.eu/juris/liste.jsf?language=fr&td=ALL&num=C-13/20
13.
CA Paris, P. 5, ch. 2, 8 déc. 2023, no 21/19696
https://www.courdecassation.fr/decision/657412aed0916383187adcd2?search_api_fulltext=21/19696&op=Rechercher&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=all&previousdecisionpage=&previousdecisionindex=&nextdecisionpage=0&nextdecisionindex=1
14.
Cass. com., 6 mars 2024, no 22-23657,
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000049261474?init=true&page=1&query=22-23.657&searchField=ALL&tab_selection=all
15.
Cass. crim., 9 mars 2021, no 20-90034
https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURDECASSATION-20210309-2090034
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