LA RESPONSABILITE DE L'EMPLOYEUR DU FAIT DE L'USAGE DES MAILS PAR SES SALARIES

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/ Mai 2022 /

Le développement d’internet a profité aux particuliers mais surtout aux entreprises qui ont rapidement adopté ce nouvel outil. Cependant, les salariés ayant accès à internet ont envoyé des mails via l’internet professionnel, il est alors important de connaître la responsabilité de l’employeur du fait de l’usage des mails par son salarié.

La responsabilité de l’employeur du fait de l’usage des mails par ses salariés s’inscrit dans le cadre de la responsabilité délictuelle reconnue par le Code civil à l’employeur. En effet, l’employeur se trouve être responsable des actes de ses employés.


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Cette responsabilité est toutefois conditionnée et n’exclue pas la totale responsabilité du salarié. Ce sera également le cas pour la responsabilité de l’employeur du fait de l’usage des mails par ses employés. Nous verrons que la responsabilité de l’employeur du fait de l’usage des mails par ses salariés est, pour certains, trop sévère envers l’employeur.

Pour d’autres, la responsabilité de l’employeur du fait de l’usage de mails par ses salariés se justifie par la nécessité de protéger les victimes de mauvais  agissements. Il se peut qu’il soit nécessaire de limiter un peu plus la responsabilité de l’employeur du fait de l’usage des mails par ses salariés tant l’utilisation des mails est banalisée de nos jours. L’importance de la question mérite dès lors toute notre attention.

 

I. La responsabilité civile des commettants du fait de leurs préposés

En droit français, l’employeur est de plein droit responsable de l’activité de ses salariés. En effet, aux termes de l’article 1242 alinéa 1 du Code civil : « on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde ».

De plus, aux termes de l’article 1242 alinéa 5 du Code civil : « les maîtres et les commettants …sont responsables… du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ».

Il s’agit là d’une responsabilité dite de plein droit, ce qui signifie qu’aucune faute personnelle de l’employeur n’est exigée pour que sa responsabilité soit engagée au regard de l’activité de ses salariés.

Cependant, la jurisprudence a dors et déjà eu l’occasion par le passé de préciser ce type de responsabilité, plus particulièrement au moyen du fameux arrêt de l’assemblée plénière du 19 mai 1988.

Ainsi, l’employeur ne peut être exonéré de ce genre de responsabilité qu’à trois conditions : que le salarié ait agi hors des fonctions pour lesquelles il était employé, que le salarié ait agit sans autorisation et enfin que le salarié ait agi à des fins étrangères à ses attributions. Dans ce cas précis, le salarié sera seul responsable de ses actes dommageables sans que son employeur n’ait alors à en assumer la responsabilité.

Ainsi, par principe, l’employeur est responsable des faits fautifs de ses salariés et c’est seulement par exception, si les conditions précitées sont remplies, que l’employeur se verra exonéré de sa responsabilité.

Néanmoins, la jurisprudence considère très souvent l’exonération n’est pas retenue. En effet, dès lors que le préposé à commis une infraction pénale sur son lieu de travail pendant son temps de travail alors, elle considère que le salarié n’aura pas agi à des fins étrangères à ses attributions.

A titre d’illustration, la responsabilité de l’employeur a été retenue par la 2e chambre civile de la Cour de cassation le 17 mars 2011 (1). En l’espèce, un professeur de musique avait agressé sexuellement ses élèves dans l’enceinte de l’établissement et pendant son cours. On aurait pu penser que les conditions puissent être remplies. Cet arrêt démontre parfaitement la difficulté de l’exonération de l’employeur, et ceux, dans l’intérêt des victimes.

 

II. La responsabilité de l’employeur du fait de l’activité de ses salariés sur internet

Avec l’omniprésence actuelle d’internet au sein du travail de tout un chacun, il semble nécessaire de déterminer l’étendue possible de la responsabilité de l’employeur du fait de l’activité de ses salariés sur le web.

Cette question mérite d’autant plus d’être posée qu’un précédent a dors et déjà été constitué par un arrêt de la cour d’appel d’Aix rendu le 13 mars 2006. Dans cette affaire, l’employé d’une entreprise de nouvelles technologies avait élaboré et mis en ligne, depuis son lieu de travail, un site internet particulièrement virulent à l’égard d’une grande société d’autoroutes. De nombreuses expressions employées furent rapportées comme outrageantes à l’égard des employés et même des clients de ladite société, qui ne tarda donc pas à porter plainte.

Ainsi donc, le salarié fût condamné sur différents fondements au regard de son activité délictuelle et dommageable (contrefaçon …). Mais, fait d’une importance toute particulière, son employeur le fût également sur la base de l’article 1242 alinéa 1 du Code civil. Pour la première fois, la responsabilité d’un employeur fût engagée du fait de l’activité de l’un de ses salariés sur internet.

Il parait intéressant de déterminer la manière dont les juges ont interprété, en l’espèce, les critères dégagés par le fameux arrêt de l’assemblée plénière du 19 mai 1988 afin de ne pas décider d’en faire profiter l’employeur, ce qui aurait pourtant pu, le cas échéant, lui permettre d’être exonéré de sa responsabilité.

Tout d’abord, pour les juges, l’employé a agi dans le cadre de ses fonctions. Ils se sont en réalité basés sur sa qualité et sa fonction de technicien pour déterminer que l’usage d’un ordinateur muni d’internet était journalier et nécéssaire pour l’accomplissement de ses tâches professionnelles. Il est utile de remarquer que de nombreuses professions pourtant moins techniques auraient pu se voir appliquer un tel critère. En effet, de nombreux salariés utilisent aujourd’hui quotidiennement internet dans le cadre de leurs fonctions (commerciaux, juristes, banquiers …).

En second lieu, pour les juges, l’employé n’a pas agi sans autorisation de son employeur. Cette affirmation est d’autant plus emprunte de véracité qu’une note de son supérieur lui avait explicitement permis d’utiliser l’équipement informatique dans le but de consulter d’autres sites que « ceux présentant un intérêt en relation directe avec l’activité ».

Cependant, il est aujourd’hui régulièrement admis, dans de nombreuses entreprises, que les salariés puissent consulter différents sites ne présentant pas de relation directe avec leur activité, bien qu’aucune note ne soit écrite à ce sujet et que le règlement intérieur n’y fasse pas toujours référence. De nombreux salariés, pourtant non techniciens et sans autorisation expresse de leur supérieur, n’auraient donc pas agi sans autorisation de l’employeur dans un cas d’espèce identique.

Enfin, pour les juges, l’employé n’a pas agi à des fins étrangères à ses attributions. En effet, celui-ci était autorisé à disposer d’un accès internet même en dehors de ses heures de travail. Il semble nécessaire de relever à nouveau que de nombreux salariés auraient pu se trouver dans une identique situation, celle-ci étant de loin la plus commune.

Cette jurisprudence peut sembler très risquée pour l’employeur dont la responsabilité risque de se trouver fréquemment engagée du fait de l’activité de ses salariés sur internet. En effet, il est très facile aujourd’hui de publier au moyen des blogs et autres forums différentes photos ou textes sur n’importe quel sujet.

Or, tous les pièges juridiques sont alors envisageables pour l’employé : de la diffamation en passant par la contrefaçon, même parfois involontaire, jusqu’au viol manifeste de l’intimité de la vie privée. Les dérapages sont d’autant plus rapides et facilités que la mise à disposition au public internaute est instantanée et aujourd’hui techniquement aisée.

Il semble donc qu’il sera nécessaire pour les employeurs de se prémunir contre cet engagement de leur responsabilité, si cette jurisprudence est maintenue dans d’autres cas d’espèce futurs. Et cela risque de passer par un refus d’utilisation d’internet (inscrit au règlement intérieur) pour des utilisations autres que celles en rapport direct avec l’activité du salarié.

Ainsi, en cas de dommage causé par l’employé lors de son utilisation d’internet, l’employeur se trouverait couvert, car l’agissement délictuel serait alors perpétré en l’absence totale de son autorisation et qui plus est en violation d’une obligation du règlement intérieur.

Cette situation ne semble pourtant peut être pas souhaitable pour deux raisons principales.

Tout d’abord, l’esprit ayant présidé à l’élaboration de l’article 1242 alinéa 1 du Code civil est inscrit dans un souci de protection de la victime qui trouvera bien entendu une bien meilleure indemnisation dans les mains d’un employeur que dans les mains de son employé.

L’ébauche de jurisprudence développée sur la responsabilité de l’employeur du fait de l’activité de ses salariés sur internet répond à une telle logique. Ce serait peut être fragiliser les victimes que de trop facilement déresponsabiliser l’employeur au regard de l’activité de ses salariés.

En second lieu, il paraîtrait à l’époque actuelle particulièrement liberticide que d’empêcher un salarié de se connecter à internet lors d’une utilisation n’entravant en rien son travail et en accord avec les bonnes mœurs. Une telle mesure serait très difficile à faire accepter dans le monde de l’entreprise actuel. De plus, elle ne semble en tout état de cause pas nécessaire au regard du seul arrêt ayant été rendu à ce sujet.

 

III. Le pouvoir de surveillance et de contrôle de l’employeur

Pour se prémunir face à l’utilisation grandissante des outils informatiques au sein des entreprises, l’employeur peut contrôler et limiter l’utilisation d’internet. Cela relève du pourvoir de surveillance et de contrôle de l’employeur. En effet, c’est ainsi qu’il peut découvrir les éventuels manquements de ses salariés.

Ainsi, avec ce contrôle de l’usage d’internet, il pourra assurer la sécurité de son réseau et limiter l’utilisation personnelle d’internet.

Il est à noter que l’employeur peut avoir accès aux sites que le salarié consulte ainsi qu’à ses courriels réputés avoir un caractère professionnel (crée sur le temps de travail).

Il y a toutefois une limite à ce contrôle. Le salarié a le droit au respect de sa vie privée conformément à l’article 9 du Code civil. Il doit être prévenu préalablement de l’existence d’une surveillance et celle-ci doit être raisonnable. Par conséquent, si un fichier ou un courriel est indiqué par le salarié comme strictement personnel avec pour objet « Strictement privé » ou « Personnel » à noter que la mention « mes documents » n’est pas suffisante.

Même dans le cas où les fichiers sont réputés personnels, l’employeur pourra avoir accès à ces fichiers, mais la présence du salarié sera obligatoire. Les courriels émis depuis la messagerie professionnelle sont présumés comme ayant un caractère professionnel, sauf mention contraire dans l’objet de manière claire et précise.

Concernant les connexions à internet via une connexion mise à la disposition du salarié dans le cadre de ses fonctions, un arrêt rendu par la Cour de cassation le 9 juillet 2008 (2) précise que l’employeur peut consulter les sites vus par l’employé. La cour ajoute que la simple présence de ces sites dans les favoris ne confère pas un caractère privé.

 

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Source :
(1)https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000023742368/
(2)https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000019166094/
https://www.cnil.fr/fr/les-outils-informatiques-au-travail

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