« PARASITISME « ENTRE DEUX SOCIETES

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/ Mai 2021 /

Ces dernières années, le domaine d’action du parasitisme a connu une expansion significative. À titre d’exemple, nous avons vu le parasitisme s’appliquer dans des litiges relatifs au logiciel informatique (Cass, 1ère civ. 13 décembre 2005), mais également à des signes distinctifs, à l’image de la panthère symbole de la Maison Cartier (Cour d’appel de Paris, 25 octobre 2015).

Le parasitisme peut être défini comme les pratiques d’une entreprise qui, afin de bénéficier d’une certaine ‘légitimité’, va délibérément ‘usurper’ la notoriété d’une entreprise reconnue œuvrant dans un secteur différent, en copiant des éléments de son commerce comme son nom, ses techniques, ou autre. Cette pratique concerne donc le domaine de la concurrence.

En effet, comme a pu le définir la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 5 juillet 2016, le parasitisme est le fait de ‘tirer indûment profit du savoir-faire et des efforts humains et financiers consentis par une entreprise, victime des agissements de la personne qui usurpe la notoriété acquise par ce concurrent.

Le parasitisme est souvent classé dans la catégorie des actes de concurrence déloyale, mais en pratique, il s’agit de deux actions bien distinctes. Le parasitisme a pour fondement la responsabilité civile délictuelle, tout comme la concurrence déloyale, mais ils ne sont pas soumis aux mêmes critères d’application.


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De même, le parasitisme se distingue de l’imitation en ce que cette dernière peut effectivement être qualifiée de concurrence déloyale sous certaines conditions liées au risque de confusion dans l’esprit du public, dans la mesure où les deux entreprises agissent au sein du même secteur d’activité.

En effet, à la différence de la concurrence déloyale, afin de caractériser le parasitisme, il n’est pas nécessaire d’apporter la preuve d’un risque de confusion entre les produits ou les entreprises (souvent difficile à rapporter), ni d’un rapport de concurrence entre ces dernières.

Lorsque l’on est en présence de droits de propriété intellectuelle, le parasitisme est systématiquement invoqué concomitamment avec l’action en contrefaçon (II). Néanmoins, un fait délictuel préjudiciable subit par une entreprise peut être réprimé sur le fondement unique du parasitisme (I)

I- La constitution du parasitisme :

Face au silence du législateur, c’est la jurisprudence qui s’est chargée de définir la notion du parasitisme (A) et à mettre en place les critères constitutifs (B)

A- Définition de la notion de parasitisme

Le parasitisme est « l'ensemble des comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre afin de tirer profit sans rien dépenser de ses efforts et de son savoir-faire » (Cass. com. 26 janvier 1999 n° 96-22.457 (1).

Il est fondé sur l’ancien l’article 1382 du code civil (nouvel article 1240(2) depuis 1er octobre 2016) et nécessite donc la réunion de trois éléments :

• une faute,

• un préjudice,

• un lien de causalité entre les deux.

Selon un jugement du 28 septembre 2015 du tribunal de commerce de Paris, la faute sanctionnée au titre du parasitisme est caractérisée par « la circonstance selon laquelle, à titre lucratif et de façon injustifiée, une personne morale ou physique s’inspire ou copie une valeur économique d’autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements ».

Dans un arrêt récent, la Cour d’appel a confirmé le jugement de première instance concernant la reproduction de photos de bouquets de fleurs sur un site concurrent. Après avoir écarté la contrefaçon et la concurrence déloyale, la Cour estime dans son arrêt du 9 décembre 2016 que « qu’une telle présentation pour commercialiser des produits similaires par le même circuit de distribution, permettant de faire l’économie des efforts qu’elle dit avoir déployés, ne présente en soi aucun caractère déloyal, seule une captation des investissements faite dans des circonstances déloyales étant de nature à caractériser une faute du parasitisme ». D’où l’importance de la caractérisation de la faute. (3)

Dans une décision plus récente, du 6 décembre 2019, le TGI de Nancy a lui aussi donné sa définition du parasitisme puisqu’il dispose que « Les actes de concurrence parasitaire, qui peuvent être définis comme l’ensemble des comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, engagent la responsabilité de leur auteur. ». Le TGI rappelle également que pour caractériser le parasitisme, il faut prouver une faute ainsi qu’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle.

 

B- L'élément matériel du parasitisme

• Le parasitisme portant sur le travail et l’investissement d’autrui :

Le but est de réprimer ceux qui détournent à leur profit, le travail et les investissements réalisés par un concurrent.

L’utilisation du travail d’autrui sans son consentement constitue donc un agissement parasitaire.

Certes, le travail en soi est détourné, mais au côté de ce critère existe celui de non-investissement.

C’est ainsi que le parasitisme n’est pas retenu dans le cas où aucune information concernant les investissements consacrés n’a été fournie. Il est donc nécessaire de prouver un réel travail intellectuel. Ce travail doit donc avoir nécessité un certain investissement, une intellection.

Ce travail doit être quantitatif, il doit pouvoir représenter une valeur économique. Cette valeur économique que le parasite a économisée en usurpant le travail d’autrui. C’est donc l’appropriation du travail d’autrui « sans bourse délier » (TGI Paris, 3e ch. Sect 4, 28 mai 2009) qui est condamnée. D’où l’importance de rapporter la preuve des investissements consentis.

La responsabilité délictuelle est alors engagée lorsqu’un « Qu’un tel comportement parasite, qui consiste à s’approprier à bon compte le travail et les investissements d’autrui » (CA Paris, 4e ch. 16 février 1994), mais pas seulement, car le parasitisme peut se traduire par une volonté de profiter illégalement d’une notoriété d’un concurrent.

• Le parasitisme portant sur la notoriété d’une entreprise :

Il convient dans ce cas de rechercher si la société n’a pas cherché à se placer dans le sillage d’une société concurrente afin de tirer profit de « sa gloire ». Le but étant l’exploitation de la renommée du concurrent.

Ce type de parasitisme a été consacré à l’article L.713-5 du Code de la Propriété intellectuelle. Un arrêt du 31 janvier 2018 a caractérisé l’existence d’actes parasitaires portant sur la notoriété d’une entreprise, en effet, la Cour de cassation considère que la société parasitaire a indéniablement profité des efforts déployés par la société parasitée, pour se construire au fur et à mesure des années une notoriété. La société parasitaire s’est donc épargné les frais nécessaires à la promotion de sa notoriété.

 

II- Le parasitisme : une action qui tend vers l'autonomie

Au travers des stratégies de défense, on remarque que le parasitisme est souvent invoqué en complément de la concurrence déloyale ou encore de la contrefaçon (A). Mais la tendance jurisprudentielle a tendance à évoluer afin d’en faire un fondement à part entier (B).

A- Le parasitisme : une action annexe/complémentaire

L'un des reproches que l'on peut faire au parasitisme, c'est qu'au fil des années, il est devenu une sorte de catégorie « fourre-tout ». Il est souvent invoqué par les entreprises qui ne sont pas titulaires de droits de propriété.

C’est pourquoi il convient de distinguer deux situations :

• Dans la première, lorsque la société demanderesse est titulaire d’un droit de propriété intellectuelle, elle a tendance à agir tant sur le fondement de la contrefaçon que celui du parasitisme.

• Dans l'autre situation, en l’absence de droit de propriété, la société ne peut se fonder que sur le parasitisme.

Par le passé, la jurisprudence a longtemps été très accueillante dans la caractérisation du parasitisme en tant que fait distinct. Les juges avaient alors condamné sur le fondement du parasitisme «car indépendamment de la contrefaçon de l’image publicitaire […] la société poursuivie avait profité à moindre coût des efforts de conception et réalisation publicitaires de la société concurrente et les avait ainsi dévalorisés » Cass. 1ère civ., 19 octobre 2004.

La distinction citée ci-dessus se base sur le «fait distinct » qui est une notion assez floue de la jurisprudence et qui est désormais utilisé afin d’éviter le cumul des deux actions à savoir la contrefaçon et le parasitisme.

Le 19 janvier 2010, la Cour de cassation a rendu un arrêt en ce sens, en estimant que « la cour d'appel, dont aucun des motifs ne caractérise la commission par la société MORGAN d'une faute distincte de la seule imitation des modèles de la société CELINE à l'origine d'un avantage concurrentiel injustifié, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil » et rappelle que « l'action en concurrence déloyale ou parasitaire ne peut être exercée concurremment à une action en contrefaçon que sur le fondement d'actes distincts de ceux critiqués au titre de la contrefaçon » (4)

Cette jurisprudence a été reprise dans un arrêt du 24 octobre 2018, où la Cour de cassation dispose que « la commercialisation d’une même gamme de produits est insuffisante à caractériser la commission d’actes de concurrence déloyale distincts de ceux sanctionnés au titre de la contrefaçon ». Pour la Cour il y a donc pas de distinction entre les actes de concurrence déloyale et les actes de contrefaçon, par conséquent, la Cour d’appel qui avait retenu la distinction avait violé l’article 1240 du Code civil.

B- Le parasitisme : une action autonome

Le parasitisme, loin de faiblir, fait l’objet d’une application autonome par la Jurisprudence.

Dans son arrêt du 13 décembre 2005 de la première chambre civile de la Cour de cassation, concernant un logiciel, la Cour écarte la contrefaçon au motif que la protection par le droit d’auteur ne joue pas lorsqu’il s’agit d’une idée, mais confirme l’arrêt de la Cour d’appel en condamnant la société pour parasitisme.

La Jurisprudence ne traite plus le parasitisme comme une action complémentaire à la contrefaçon. Les demandeurs fondent désormais leur défense (rarement, mais cela tend à croître) uniquement sur la base juridique du parasitisme (Cour d’appel de Paris du 25 octobre 2015).

Un arrêt du 4 juillet 2019 vient ainsi rappeler qu’il n’importe pas que l’action en parasitisme porte sur un objet protégé par un droit de la propriété intellectuelle. En effet la Cour de cassation rappelle que l’action en parasitisme est une action autonome, fondée sur la responsabilité délictuelle de l’article 1240 du Code civil.

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Sources :

(1) https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007397671&fastReqId=781988466&fastPos=1
(2) https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070721&idArticle=LEGIARTI000006437044
(3) https://www.legalis.net/actualite/e-commerce-pas-de-concurrence-deloyale-pour-la-reproduction-de-photos-de-bouquets/
(4) https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000021734255
TGI de Nancy, pôle civil – sec. 7 civile, jugement du 6 décembre 2019
https://www.legalis.net/jurisprudences/tgi-de-nancy-pole-civil-sec-7-civile-jugement-du-6-decembre-2019/
Cour de cassation, 31 janvier 2018 / n° 15-28.352
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000036584708
Cour de cassation, 24 octobre 2018, 16-23.214
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000037556171
Cour de cassation, 4 juillet 2019, 18-21.554https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000038762769?init=true&page=1&query=18-21.554&searchField=ALL&tab_selection=all

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