LE NON RESPECT DE LA CLAUSE DE CONFIDENTIALITE, QUELLES SANCTIONS ?

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/ Décembre 2021/

La clause de confidentialité, qui ne doit pas être confondue avec la clause de non-concurrence qui se limite dans le temps et dans l’espace, est celle par laquelle l’entreprise entend protéger un savoir-faire qui lui est propre. De fait, les obligations liées au respect de cette clause interdisent aux salariés d’utiliser directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit, les connaissances acquises à l’occasion de leur travail, y compris après la cessation de son contrat de travail. Dans ce cadre, quelles sanctions pour le non-respect de cette clause de confidentialité par les salariés ?

Si l’article L1227-1 du Code du travail encadre le secret de fabrique, qui concerne à proprement parler le secret lié au procédé de fabrication des produits de l’entreprise et dont la violation constitue un délit, aucune disposition du Code du travail ne prévoit expressément le régime de la clause de confidentialité. Celle-ci sera donc prévue dans ses modalités soit directement au sein du contrat de travail liant le salarié à son employeur, soit par un accord collectif.

Néanmoins, l’article L1121-1 du même Code prévoit que le non-respect de la clause de confidentialité peut être sanctionné, notamment, à condition que celle-ci fût « justifiée par la nature de la tâche à accomplir (et) proportionnée au but recherché ».

Il convient de préciser que la loi 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires transposant la directive européenne 2016/943 du 8 juin 2016 sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulguées (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites en droit interne, n’a pas apporté de modification substantielle quant à la réparation civile. (1)

Cela dit, cette directive a permis d’introduire une grille d’analyse harmonisée permettant le calcul du montant du préjudice susceptible d’être réclamé.

Pour autant, et sans trop schématiser, on peut dire que dans la plupart des systèmes juridiques, et en particulier le nôtre, il n’existe pas à proprement parler de protection légale de « la donnée confidentielle ». L’entreprise ne les protège contre le risque de divulgation que si elle le juge opportun. La protection de ces données est donc essentiellement contractuelle.


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Cela conduit à se demander si, en l’absence de dispositions légales, le salarié peut ou non être sanctionné pour la diffusion d’informations confidentielles sur son entreprise ? S’il est vrai que la législation ne prévoit rien en ce qui concerne la clause de confidentialité, son non-respect (1) est tout de même sanctionné par la jurisprudence (2).

 

I) Le non respect de la clause de confidentialité…

La notion de clause de confidentialité est essentielle dans les entreprises (A). Un certain nombre de sanctions sont d’ailleurs prévues en cas de violation (B).

A) La notion de clause de confidentialité

Indépendamment de son obligation générale de discrétion , les salariés peuvent être tenus, en vertu de leur contrat de travail, à des clauses dites de confidentialité qui leur interdisent de divulguer certaines informations expressément identifiées comme « confidentielles ». Cette clause s'impose à tous les salariés, même en l'absence de stipulation expresse. Elle est essentielle et doit être imposée à toute personne susceptible d’avoir accès au savoir-faire .

Concrètement, la clause de confidentialité se rapporte aux secrets de fabrication, aux secrets d’affaires ou aux secrets liés aux matières personnelles ou confidentielles, dont l’employé peut avoir connaissance dans le cadre de son activité professionnelle. Et peut-être, plus ou moins large selon l'emploi occupé. En effet, les salariés de l’entreprise, du moins ceux ayant accès aux informations stratégiques et à l’innovation, peuvent être tenus d’une obligation de confidentialité, tant durant leur contrat de travail, qu’après la fin de celui-ci.

Enfin, des dispositions pénales prévoient que l’employé doit s’abstenir de communiquer à des tiers les secrets de fabrication, qu’ils soient ou non liés à ses tâches, à des fins malveillantes ou frauduleuses : « le fait, par tout directeur ou salarié d’une entreprise où il est employé, de révéler ou de tenter de révéler un secret de fabrique est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende ».

B) La diversité des sanctions en cas de violation

Aussi étrange que cela puisse paraître, le droit du travail ne prévoit rien en ce qui concerne la clause de confidentialité. En effet, les conséquences en cas de non-respect de cette obligation sont en pratique, fixées par la jurisprudence. Selon celle-ci, l’employeur lésé en raison du non-respect de l’obligation de confidentialité peut, pendant la durée du contrat de travail, réclamer à l’employé des dommages et intérêts.

La responsabilité est toutefois limitée pendant l’exécution du contrat de travail. Cela signifie que l’employé ne peut être tenu responsable que de son comportement ou de sa faute grave. En cas de faute mineure, il ne pourra en être tenu responsable que si la faute n’est pas fortuite.

En outre, après la fin du contrat de travail ou pour les actes qui ne tombent pas sous la relation professionnelle, l’employeur ne pourra réclamer des dommages et intérêts que sur la base des dispositions de droit commun .

Des sanctions spécifiques, propres à l’entreprise, peuvent néanmoins être prévues par un règlement interne. Exemple : des amendes, des avertissements… Un manquement grave à l’obligation de confidentialité peut même mener au licenciement pour motif urgent. Enfin, si l’employé agit dans l’intention de nuire à l’employeur ou d’en tirer illégalement profit pour lui-même ou pour autrui, il s’expose à une peine de trois mois à trois ans d’emprisonnement et à une amende. Mais ça, c’est à la jurisprudence d’en décider.

II) … sanctionné par la jurisprudence

Outre l’affirmation de la licéité des clauses de confidentialité se prolongeant après la cessation du contrat de travail (A), la Cour de cassation sanctionne fermement tout manquement à son encontre (B).

A) La clause de confidentialité : applicable après la rupture du contrat de travail

Dans un arrêt du 19 mars 2008 , la Cour de cassation admet la validité d’une clause de confidentialité se prolongeant après la cessation du contrat de travail. En l’espèce, l’affaire portée devant les juges opposait un célèbre guide gastronomique à l’un de ses salariés lié par une telle clause. Menaçant de publier un livre révélant les procédés d’élaboration du guide, le salarié est licencié pour faute grave en raison notamment « des violations répétées et délibérées des obligations résultant de son contrat de travail ».

Il intente une action devant le Conseil de prud’hommes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et publie son livre. La société forme alors une demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour violation de la clause de confidentialité insérée dans le contrat de travail du salarié. La Cour d’appel de Paris approuve le licenciement en raison de la violation par le salarié de son obligation de discrétion valable pendant l’exécution du contrat de travail. En revanche, elle rejette la demande de l’employeur au motif que la clause de confidentialité ne s’applique pas après la rupture du contrat de travail.

La Cour de cassation approuve les juges du fond concernant le motif du licenciement mais censure leur décision concernant la clause de confidentialité. La Cour suprême estime, en effet, qu’une telle clause « peut valablement prévoir qu’elle s’appliquera après la fin du contrat de travail et que l’inexécution par le salarié de l’obligation de confidentialité postérieurement à son départ de l’entreprise le rend responsable du préjudice subi par celle-ci, même en l’absence de faute lourde ». Il est donc clair que la clause de confidentialité se prolonge même après la cessation de son contrat de travail.

Ce manquement est, en principe, sanctionné par le versement de dommages et intérêts à l’employeur. A cet égard, la Cour d’appel de Dijon, dans un arrêt rendu le 15 octobre 2020, précise que « celui qui contrevient à une obligation contractuelle de ne pas faire doit des dommages et intérêts par le seul fait de la contravention, peu important qu’il ne soit justifié d’aucun préjudice ». (2)

Ainsi, un salarié peut engager sa responsabilité du simple manquement à son obligation contractuelle. En effet, la preuve de l’existence d’un préjudice n’est pas exigée.

B) Toute violation à la clause de confidentialité : fermement sanctionnée

Par jugement du 28 septembre 2010, le Tribunal de commerce de Paris a condamné la société GS1 (spécialisée dans la fourniture de produits et services liés à la traçabilité) à verser trois millions d’euros de dommages-intérêts pour avoir violé plusieurs clauses de confidentialité, de propriété intellectuelle et de non-concurrence. En l’espèce, GS1 avait, dans un premier temps, lancé un appel d’offres pour la phase pilote de son projet logiciel, en exécution duquel la société TRACEVAL (qui diffuse des standards dans la chaîne d’approvisionnement) avait notamment livré un cahier des charges et des éléments couverts par lesdites clauses.

Dans un arrêt récent de la Cour de cassation, rendu le 30 septembre 2020, celle-ci s’est prononcée sur le licenciement pour faute grave d’une salariée ayant manqué à son obligation de confidentialité.

En l’espèce, une salariée engagée en qualité de chef de projet export par la société Petit Bateau. Cette dernière a été notifiée de son licenciement pour faute grave par lettre. La salariée avait manqué à son obligation contractuelle de confidentialité par la publication sur son compte Facebook d’une photographie de la nouvelle collection qui avait été présentée exclusivement aux commerciaux de la société.

La salariée avait saisi le Conseil de prud’hommes pour contester son licenciement. La Cour de cassation a confirmé la position de la Cour d’appel qui avait admis le licenciement pour faute de la salariée. (3)

A cet effet, il convient de préciser que, en outre des sanctions disciplinaires auxquels s’expose le salarié, ce dernier s’expose également au paiement d’un montant considérable de dommages et intérêts en fonction de l’ampleur des informations divulguées ainsi que du contenu de la clause de confidentialité.

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Sources :

(1)    : LOI n° 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires

(2)    : Cour d’appel de Dijon, Chambre sociale, 15 octobre 2020, n° 18/00959

(3)    : C.Cass., Soc, 30 septembre 2020, n° 19-12.058

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